Conjugaison

Et encore…

Tandis qu'après, on utiliserait

L'indicatif,

Surtout quand, au jardin,

Tous les parapluie auraient été

Conjugués en même temps

Que le hérisson endormi.

Penser aux poireaux

À califourchon sur le foutre de l'aube

Faconde s'apprête à trahir ses larmes

Comme celui qui torture l'amoureuse

Sans rêver aux épluchures de catacombes



Je fais le serment de penser aux poireaux !

Créchi-créchaphobe

Après que l'âne a chaviré,

C'est le bœuf déséquilibré

Qui a tourné son cul vers la

Mec.

Accord

Johnson Johnson demande le la.

Faconde Norwest, qui a pincé son

Téton gauche, fait la grimace.

« Oui, c'est un peu bas ! »

Un, deux, trois…

Un, deux, trois,

Un, deux, trois,

Un, deux, trois…


Bon, ça va, on a compris !


Tu n'as rien compris du tout,

Écoute !


Un, deux, trois,

Un, deux, trois,

Un, deux, trois…


Ah oui, là, je comprends mieux !


Ça m'étonnerait…

Tu es encore loin du compte !

(Et tiens-toi droite.)


(…)

Santé publique

Hier-soir je m'en souviens très bien c'était hier-soir,

Nous étions là, elle et moi, et lui, et eux,

Ensemble, chacun étant assis, bien confortablement,

Et tous nous devisions, dans cette pièce bien chauffée,

Alors que la pluie tombait au-dehors,

Et que le chien dormait près de la cheminée.


Je ne permettrai à quiconque de dire

Que les choses se sont passées autrement.


J'étais là, elle était là, ils étaient là,

Il devait faire près de vingt-deux degrés dans la pièce,

Et nous nous étions servis à boire,

Et la conversation roulait confortablement,

Sans heurts, sans à-coups, sans longues digressions,

Sans tunnels exagérés, et sans que la voix de

L'un d'entre nous s'élève plus que nécessaire.


Tout ce que je dis là est parfaitement exact,

Conforme à la vérité, à mes souvenirs,

Et serait facilement vérifiable en ce moment-même

Si je n'étais pas le seul survivant.


Hier-soir n'est pas si loin que je ne puisse

M'en souvenir avec précision.


Je dirai tout de même ceci, qui sera je l'espère entendu :

La santé publique n'était pas notre préoccupation première.

Pliure

C'est la vêture d'une biffure.

Dans la nervure des sonorités

Il n'a pas son pareil :

Pliure est un de mes mots préférés.

Polyphonie X (sonore)

A. Ananas que ne viens t'appelle jamais canon souvent on me l'art imperméable de la fugue elle je suis dit trop à l'écrevisse en lourd mais quand rébus à la culotte il suffit le pot-au-feu d'inverser finissons l'attraction méphitique entourloupe.

B. Culotte il suffit ananas finissons que ne jamais viens canon t'appelle souvent imperméable de la fugue on me l'écrevisse elle en lourd quand rébus l'art  entourloupe pot-au-feu méphitique à la d'inverser le je suis dit trop à mais l'attraction.

C. Entourloupe il jamais trop imperméable suffit d'inverser rébus l'art ananas t'appelle souvent que ne viens canon finissons on me mais l'attraction elle en lourd de la fugue méphitique l'écrevisse quand culotte pot-au-feu à la le je suis dit à.

D. Jamais ananas t'appelle que ne viens canon on me de la mais quand trop souvent entourloupe fugue elle je suis dit à l'écrevisse en lourd rébus pot-au-l'art imperméable l'attraction à la culotte il suffit d'inverser finissons méphitique le feu.

X. Jamais t'appelle ne canon me la quand souvent fugue je dit l'écrevisse lourd pot-au-l'art l'attraction la il d'inverser méphitique feu il trop suffit rébus ananas souvent ne canon on mais elle lourd la méphitique quand pot-au-feu la je dit.

1. Jamais t'appelle jamais ne canon me canon la quand souvent quand fugue je dit l'écrevisse dit lourd pot-au-l'art l'attraction l'art la il d'inverser il méphitique feu il feu trop suffit trop rébus ananas rébus souvent ne ananas canon on mais canon elle lourd la elle méphitique lourd quand pot-au-feu la quand je dit.

2. Jamais jamais t'appelle jamais ne canon canon me canon la quand quand souvent quand fugue je fugue dit l'écrevisse dit l'écrevisse lourd pot-au-l'art lourd l'attraction l'art la l'art il d'inverser il d'inverser méphitique feu il feu trop suffit trop rébus suffit ananas rébus souvent ne souvent ananas canon on canon mais canon elle lourd la elle lourd méphitique lourd quand pot-au-feu la quand pot-au-feu je dit.

3. Culotte il suffit ananas finissons entourloupe il jamais trop imperméable que ne jamais viens canon suffit d'inverser rébus l'art ananas t'appelle souvent imperméable de la t'appelle souvent que ne viens fugue on me l'écrevisse elle canon finissons on me mais elle en lourd quand rébus l'attraction elle en lourd de l'art entourloupe pot-au-feu méphitique à fugue méphitique l'écrevisse quand culotte dit trop à mais l'attraction.

Quelques Messages personnels

Les ventouses parlantes ont commencé  leur travail. (2)

Si Bernadette ne vient pas à Noël, l'été sera rude quand-même.

La chèvre préfère le pain complet, et le bélier le nougat.

Après les lacs, les sapins font des rondes de nuit. (2)

Les deux alpinistes ont perdu le Monopoly de tante Yvonne. (2)

Quand la lubricité se retire, le jardin retrouve ses couleurs.

Si la Comtesse nous refait une fondue, le gouvernement tombera. (2)

Le grand cyprès a toussé deux fois. Marianne s'est éveillée.

Abroger l'alphabet ne fera pas revenir Adolphe. (3)

Par où est entré le curé sortira le solstice, à moins que rien.

Les dessous de Ginette sont autant de plaques de verglas courroucées.

Il est temps de penser aux baleines, le temps se gâte.

À Pâques, les clitoris feront une brève apparition. (2)

Rêve et Vide

Rêve et vide : en deux amphores analogues se tient le prêtre

Qui par son envol ironique prend le monde en crue

D'espace et de moire comme destin annulé.

Quelle beauté ivre serait assez paresseuse

Pour ignorer le bouquet où l'absence apparaît

Telle une épiphanie du sens ?

Sous le papier subtil une encre tonale

Bruisse comme le catafalque au zénith

De la nuit transposée en son ample retour.


« Tu n'as pas honte, Johnson Johnson ?

— Si, Faconde, j'ai très honte ! »

Climat

— Enlevez-lui ses menottes.

— Je ne l'ai pas tuée, alors ?

— Tuer ou non, ça n'est pas la question.

— Excusez-moi…

— La question, c'est le titre du récit.

— « Contribution au réchauffement climatique » ?

Dialogue sur l'immortalité

— Je ne voudrais pas mourir sans avoir publié un livre.

— Alors tu seras immortelle, ma fille.

— Je voudrais laisser une trace, vous comprenez !

— Au final, t'as qu'à te faire construire une tombe !

— Je suis pas trop "tombe"…

— Alors dégage ! On n'a pas que ça à foutre.

— Vous êtes méchant, je vais me suicider.

(— La conne, elle croit être en vie ?)

Yalta

Ce soir-là nous étions à Yalta…

« Mais qu'est-ce que tu racontes ? »

Ce soir-là nous étions à Yalta

Et le monde était une continuelle perfection.

« Je sais ce que je dis, tout de même ! »

911

— Allo le 911 ?
— Oui, quel est votre problème ?
— Je ne peux pas sortir !
— Vous êtes enfermé ?
— Oui, on m'a enfermé, je ne peux pas sortir !
— OK. Dites-moi où vous êtes.
— Je ne sais pas, je ne connais pas l'adresse.
— Vous ne connaissez pas l'adresse… On vous a enlevé ?
— Oui, je crois qu'on peut dire ça.
— Dites-moi ce que vous voyez.
— C'est un salon, assez banal, avec une télé et un canapé. Rien de spécial…
— Mais pourquoi ne pouvez-vous pas sortir ? Vous êtes attaché ?
— Non, je ne suis pas attaché. Mais je ne sais pas traverser des parois de verre !
— Des parois de verre ? Je ne comprends pas. Où sont ces parois de verre ?
— Mais autour de l'eau, bien sûr !
— De l'eau ? Il y a de l'eau dans l'appartement ??? Monsieur, avez-vous pris de la drogue ?
— Je n'ai pris que ce qu'on m'a donné, une sorte de nourriture en poudre… Dégueulasse…
— Bon, bon, je vois,  je vais vous envoyer une ambulance.
— Mais je n'ai pas besoin d'ambulance, je suis enfermé, je vous dis !
— Oui, je sais, Monsieur, calmez-vous, je vais trouver votre adresse grâce à votre numéro.
— En plus il n'a pas changé l'eau depuis au moins deux jours !
— De quelle eau parlez-vous, Monsieur ?
— Comment ça, de quelle eau je parle ? Mais vous êtes qui, vous ?
— Je suis le sergent Michael Fulton, Monsieur.
— Sergent Fulton, vous vivez dans quelle rivière ?
— …
— Oh, merde, il y a le chat qui revient ! Faites vite !
— Monsieur, calmez-vous, je vous envoie quelqu'un, éloignez-vous de la porte.
— Mais comment voulez-vous que je m'éloigne de la porte ?
— Vous ne pouvez pas bouger, vous êtes trop faible, c'est ça ?
— Je ne suis pas trop faible, Don Dieu, je suis dans un bocal, et je ne sais pas faire bouger les bocaux !
— Dans un bocal… Et dans l'eau ?
— Évidemment que je suis dans l'eau, comment je pourrais respirer, sinon ?

Tout à coup !

Le bombé d'une petite culotte de coton blanc,

Légèrement soulevée par la touffe au-dessous,

Camouflée moite aux odeurs de sirop confit

Stupeur perpendiculaire aux gouffres du temps !

Après

— C'était comment ?

— Torride…

— Torride comment ?

— Torride torride !

— Ah ouais ?

— Ouais.

— Tu dois être content ?

— Oui, je vais me flinguer.

— Arrête de déconner…

— Je déconne pas.

— Je sais, je déconne !

Transistor

J'applique mon oreille sur le creux

de son corps

Et j'entends de la friture.

(…)

Faconde n'a jamais su régler

Son transistor.

Djihad

Bon, c'est très simple !

À la prochaine piqure de moustique,

Je pars faire le djihad

En ville.

(Vous l'aurez voulu.)

L'Affaire (épisode 2)

Le président et (moi nous) nous séparons :

Infusion nucléaire en nuages (roux)

Élection (piège) à compte d'auteure

Quand ces (nonchaloir) tirailleries

D'opaques ganglions (coltinés)

Moments à (Sumer) somment Valérie.

Puci (la paire) commémore la comète

De la mort (tandis que) les antiques

(Croa) sens et inflations merci

De soustractions (en) marge

Tue (folichonneras) les Cendrillons

Je pleure, et (rejoindre) mes officiers

De sécurité (je) dois surtout

Ne pas allumer (la) télévision

Le conseiller (culture) en voiture

Simone (pédaler) à la Lanterne

Impossible, (tu mens !)

L'affaire (épisode 1)

L'imperméable en stock, on verra venir

Si de tant de tambours entendus

De la pluie vient entre deux fruits

Comme une sirène enregistrée

Sur la scène du dancing.

Croa croa, et coke en toc

Par-delà les mers allongées,

Grises et paresseuses,

D'une surprise en triolet,

Babar et Marius, enlacés et ivres,

Comme des cadavres ébahis

Par l'aube alitée à Varèse,

Donnent à Valérie la migraine.

Elle les voit, croa croa, comme

Des boas constipés aux antipodes

Et ça la chagrine. Un moment !

Sur la table basse, comme œuf au plat

Elle s'éponge le front

Tandis que François texte.

La poudre explose dans ma tête,

Con c'est con mais je titube

Titube et retitube

Et puis je suis une fille donc je vais

Vers la femme !

Une longue nuit quasi blanche commence…

Croa croa, Caro vient me voir,

À l'hôpital, on papote comme,

Comme et comme,

Et encore comme, et ça va,

Pardon mais ça va, je mijote,

Elle mijote, nous mijotons,

Alors, les nouvelles, quelles

Conques et sous-marins il

Me ment, me ment, me ment.

Sac en plastique, salle de bains,

Clinique, des heures suspendues,

Par le couloir secret, on

Se passe la foudre, salopard,

Je vais te reconquérir,

Tu te souviens de Tulle,

En scooter, trempés comme des moules ?

Malraux, toi et le piano, ça

Fait trop pour un drame en tweet.

Et si je faisais un livre ?

(…)



Plan de carrière

C'est décidé, j'appelle Kimi !

Je lui propose de leur composer un hymne.

Il me paie un million de dollars,

Et là, je pars en vacances à Gaza.


— On boit de la chicorée, là-bas ?

Le monde expliqué simplement


Il est temps, Faconde, que je t'explique le monde.

N'aie pas peur, c'est très simple.


Nous allons procéder par images :

Ma première image est un pubis de femme ;

Ma deuxième image est un décolleté de femme ;

Ma troisième image est un trou du cul.


Voilà, c'est tout. Tu as suivi ?


Oui, c'est très simple. J'ai seulement une question :

Le trou du cul, c'est un homme ?


Oui, bien sûr, Faconde, le trou du cul

C'est l'invention du zéro,

Sans lequel l'infini n'est pas concevable.


Tu devrais ajouter la pomme de terre…

Sinon je ne vois pas bien

À quoi sert l'infini.

Bonsoir, c'est Dieu !

C'est moi, Dieu.

Vous en faites du boucan, sur la Terre !

Je ne sais pas si vous vous rendez compte mais vous faites un boucan de tous les diables !

En réalité, je n'écoute pas vraiment votre boucan, mais je l'entends !

Foutue idée que j'ai eue de vous répartir aux quatre coins du globe.

Il y en a toujours qui ne dorment pas.

Ça n'arrête jamais.

Non mais vous imaginez, le boucan que je me tape, moi, là-haut ?

Toutes vos musiques, toutes vos paroles, j'entends tout à la fois.

Plus les bébés qui gueulent, plus les scènes de ménage.

Excusez-moi de vous le dire, mais c'est affreux !

Quel bordel ! Quelle cacophonie ! Quel ramdam !

Entretuez-vous si vous voulez, mais faites-le en silence, quoi !

Ah oui, les mobylettes… Alors là les mobylettes c'est le pompon !

Encore les avions, je ne sais pas pourquoi mais je m'y fais,

Mais alors les mobylettes, non, c'est affreux !

Je suis désolé de vous le dire, mais je préfère encore les bombes.

D'accord, ça fait du bruit, mais au moins il y a un résultat.

À chaque bombe, je peux me dire : au moins une cinquantaine qui vont la fermer pour de bon.

Comprenez-moi bien. J'ai fait une connerie…

Cette création du monde, c'était une connerie.

Oui, sur le moment, je reconnais que ça avait de la gueule.

On a même eu des bons moments, je dis pas.

Mais là, faut me comprendre, j'en ai marre.

Je pensais que tout ça n'aurait qu'un temps, voyez !

Je me disais, allez, une bonne guerre mondiale et on n'en parle plus.

Que dalle, oui… Ah on peut dire que vous êtes tenaces.

J'ai essayé la peste, la grippe, le SIDA, la tuberculose,

Le trou dans la couche d'ozone, les criquets, la pollution,

Le réchauffement climatique, les tsunamis, les cyclones,

Les volcans, les inondations, la sécheresse, Jean-Michel Jarre, les femmes…

Je commence à être à court d'idées. Bon, mon dernier truc,

C'est l'islam. J'ai de bons espoirs.

Mais à chaque fois, j'ai eu de bons espoirs !

Alors maintenant je reste prudent.

Wait and see…

J'ai tout mon temps, c'est vrai,

Mais si au moins vous pouviez faire un peu moins de bruit !

C'est quand-même pas trop demander, ça !

Hein ?

Baissez juste d'un ton, quoi, je ne suis pas exigeant !

Vous faites vos affaires en bas, et moi je fais les miennes en haut.

On pourrait avoir de bons rapports de voisins, vous voyez ?

Je vous laisse faire tout ce que vous voulez, hein, on ne peut pas dire que je vous brime !

La seule chose que je vous demande, c'est d'interdire les mobylettes

Et de mettre votre foutue musique moins fort.

Allez, ne faites pas la gueule, c'est pas souvent que je râle.

Bonne continuation et fermez-là un peu,

Faut que j'y aille, là.

Le travail c'est la vie

Kagi peint.

Mais le trait qu'il trace sur le papier s'efface aussi vite qu'il apparaît.

Alors Kagi dépeint.

Mais ce qu'il voit sous le pinceau l'effraie tellement qu'il meurt de peur.

Consommation

Et lorsque tout fut consommé

Ils restèrent pourtant assis

Sans se regarder ni parler.


C'étaient ces grands moments

Comme il y en avait

Dans le monde d'antan.


(Être concis

Leur déplaisait.)

Jus

Le thème du larghetto du K. 491, tu vois,

C'est là que tout a commencé,

Si l'on veut.


Je veux bien,

Mais comment en est-on arrivé là ?


Il faut lire Madame Saint-Ange,

Pour que tout s'éclaircisse.


Quel travail !

Léger différé

— You look like Martha Argerich !

— U like to suck cock, bb ?

— À qui je réponds, là ?

Elle reprend un peu de milkshake.

Sillon fermé

— Quel silence !

— Oui, on dirait qu'ils sont tous morts.

— On ne dirait pas, ils le sont.

— C'est pas une raison, quand-même !

— Non, ce n'est pas une raison.

No Pasaran !

« No Pasaran ! » dit Faconde, en écoutant Joy de Stockhausen.

Elle flotte dans l'espace, entre Neptune et Uranus,

Et se tire la corde sans penser à mal.


— C'est comme un pet intersidéral !

Complainte de Roger

Ergo, l'Ogre Roger,

Rouge, Rogue, à tête d'Orge

Qui joue de l'Orgue dans l'Oregon

Pendant les Orages

Aux Arômes amers

D'orgasmes morses,

Se tient sous les Ormes,

Égaré, ses Rames en main

La Rage et l'asthme

Pour compagnons.

Dans sa prunelle en O

Qui pleure de l'Or,

De l'Or Gros

Comme Oméga,

Le Mage Roger

Imagine une gamine

À angle aigu,

Aigu comme le vol grave

De l'aigle agile qui

L'emporte, sanglée,

Vers l'Ogre Roger

Rouge sous ses Ormes,

À Rome, dans l'Oregon.

L'Instant

En pastis fouetté, virevoltant comme pas deux,

Les amygdales de Léontine et la langue slave

En confettis de vapeur, elle s'est mise à

Hurler comme une tour Eiffel

Qu'on chatouillerait par en-dessous.

Les Partisans

À la fenêtre, un peu de thé

Et la fonte des neiges,

Et, si l'on peut y croire,

Une bêtise comme on n'en fait plus.

C'est donc tout le gratin

Qui parade en deçà

De la République.


À la maison

— Faconde, peux-tu baisser le son ?

— Non, je ne peux pas.

— D'ici je reconnais Yves Nat !

— Ça t'apprendra à jouer du piano comme un âne.

— Connasse !

— Connard !

— Allez, viens, petit chat, j'ai acheté les croquettes que tu aimes.

— Tu me prends pour la Queffelec ?

— …

Mozart

Mozart, oui, quoi Mozart ?

S'il avait eu un sexe aussi gros que le mien,

J'aimerais bien savoir

Ce qu'il aurait composé comme symphonies !

Rossignolet

Rossignolet, retourne dans ta forêt,

Je suis fatigué de t'entendre chanter,

J'ai besoin de dormir,

J'ai besoin de mourir,

Comme tous les hommes,

Je dois partir rejoindre

Les miens qui sont en terre.


Rossignolet, retourne dans la forêt,

Laisse-moi dormir,

Laisse-moi mourir,

Je suis fatigué de vivre,

Et comme tous ceux qui vivent,

Je suis arrivé là où la terre

Sur moi doit se refermer.

Au menu chez les Rosicruciens dépravés

Adalmine Vermot vient de nous cuisiner ses fameux beignets de coton hydrophile au gingembre. C'était fameux. Puis Marcel Tricolor s'est mis à l'épinette et nous a interprété les Airs à faire fuir, de l'Homme en fonte. C'était rudement bath. 

J'ai ensuite entonné ma Grande Suite Lyrique en ut dièse pour flageolet mal cuit et Luna s'est mise à hurler à l'amour. C'était chouette.

Demain, si tout va bien, nous béniront les spaghetti qui trempent depuis six semaines dans une histoire louche. Nous irons à Arcueil, puis en Patagonie. Ce sera épatant !

Au Pénal !

Ah, les procès, Faconde, les procès…

Quelle joie, quels bonheurs

En perspective !

Avocats, juges, témoins, greffiers,

Policiers, indics, corbeaux, jurés,

Procureurs hilares, la cour ébouriffée,

Public en transe, les têtes

Qui roulent, qui tombent,

Le sang dans les rues, dans les banques,

Au trot, au galop, comédie tragique,

Comptes-rendus, plaidoiries,

Parjures, coups bas, subornation,

Élimination, intimidation,

Pensions, tensions, explosions,

Coups de théâtre, balances,

Manches, appels, cassation,

Effets, déclarations, serments,

Stupeur, suspension, condamnation.


On ne va pas s'ennuyer

Dans la sciure !

Rien que d'y penser,

Je bande.

Partage des tâches

Johnson Johnson s'est amusé

À parler avec des strip-teaseuses

Dans une langue qui n'existe pas.


— Et qui c'est qu'est allé faire les courses à Super-U ?

Romance

Ce matin un kamikaze est entré dans la cuisine il m'a demandé un bol de café je lui ai servi avec des tartines au miel son bol de café il s'est assis nous avons parlé un peu du temps qu'il fait et aussi de nos projets de vie respectifs puis il est parti j'ai lavé son bol rangé la cuisine et je suis allée me doucher en chantant une vieille romance française c'est à ce moment-là que j'ai pensé à mon chien dans la terre et j'ai pensé il doit avoir bien froid le pauvre je ne chanterai plus de vieille romance française il fait trop chaud.

On ferme !


Qu'il ne reste rien !

Tout doit disparaître !

Jetez tout !

Brûlez tout !

Cassez tout !

Ne faiblissez pas !

Ne vous apitoyez pas !

Ne vous endormez pas !

Ne regardez pas en arrière !

Brûlez-vous, vous aussi !

Ne vous inquiétez pas de votre sort !

Je m'occuperai de tout,

Quand je serai enfin seul.

Puis

Avec toutes ces cendres,

Je me ferai un lit confortable,

Sur lequel je m'allongerai,

Et je raconterai votre

Histoire aux bêtes.

Sublime

Il voulait dire quelque

Chose de définitif

Mais il fallait aller

Vider la poubelle.


La vie s'y entendait pour

L'empêcher d'être sublime !

Torse

Mon bel Azor, ton torse est à l'envers !


(Et le vide de l'aiguillon

Dont l'âcre moment

Du visage

Me parle en éclaboussant

Le livre ouvert…)


Au cap, tout droit, c'est un

Vice qui disparaît,

Gifle agile en revers.

Toi !

Toi !

Ce Mal emporté au désert,

Cette rose déchirée,

Ce muscle increvable,

Ce vertige muet…


Veux-tu fermer la porte en sortant ?

Michèle

Michèle, assise, devant sa petite table,

Sa bouche bien rouge

Comme une idée trompée

Par le sang des autres.

Amant et boule de neige

Amant et boule de neige

Comme cochons en pâte…

C'est la rue qui parle,

Mieux que la police !

Pensée

Pensée dans le sachet

Qu'il trempe dans

L'eau chaude

Cachet tiède et penché

Et les malheurs de Sophie


— Qu'en faire ?

Au piano

La plaie, entrevue,

Sous le coton, au piano…


Le Temple est fermé pour cause de réparations.

Dialogue poétique

Habiter l'éclair

Comme Zip habite

mon pantalon ?


— Faconde, tu es le serpent

Du soleil fuyant

La Terre.


— Arrête ton char,

Johnson Johnson,

Tu m'assommes l'arrosoir !


— Faconde, tu n'es

Qu'une vieille bique néfaste

Puant le sarcasme pourri.


— Pauvre Biquet

Qui sent le poireau frais

Dans son bidet…


— Je t'ai déjà tuée

Tant de fois… Allons-y,

Ce sera vite fait.


— Attends un peu,

Je viens de mettre

Le pot-au-feu à cuire.

Sa main

Retire-toi mon cœur

D'un si vaste embrasement

Que l'heure

N'y résisterait pas


Comme l'ombre

Va écrire plus loin

Vers le vieil organiste

Silencieux


Sa belle main qui me déchire

Entre le couchant et l'or

Sans poids ni espérance

Vers le jour éteint

Joan Baez

« Au lieu de se taire,

On dit qu'on se tait. »

Et maintenant,

Mesdames et Messieurs :

Joan Baez !

Les Bonnes Femmes

Bernadette Lafont et Stéphane Audran,

Au téléphone :

« Monsieur Rohmer

A le derrière

Qui sent le munster ! »

Pendant le tournage des

Bonnes Femmes.

La Question

Toute la matinée

Y a passé.

Pouvait-il écrire :

« Des affres affreuses » ?

Les cons

Ah les cons ! Les cons !

Petits, grands, mous, durs,

Les cons et les connes,

Comme les larves,

Mouches enculeuses

Au petit matin déjà au travail.

Tagadadoo, youdi…

Tagadadoo ! Tagadadoo !

Wouououhoulup, zag zag zag,

Ziiiiik, kranok, kronak, zaaaaAk !

Tagadadoo : flip-flap-tolop-NA.

Mgo-dong, ngo-dong, dgo-go-go gütrrr…

Weitnok, tilou nilou, bakdakclakflakschak.

Tô. Dadoo, dadadadoo, tagarrradoo !

Le Bain

— Geoffroy, sors immédiatement de ton bain ! 

— Maman, le disque n'est pas fini ! 

— Robert ! Ton fils choisit toujours des interprétations de Furtwängler pour aller se laver, fais quelque chose ! 

— Toscanini est un gros nul !

Transparence

Transparence de l'art et du réel,

Georgette, rue du Poids-de-la-Farine.

La fraîcheur, quand je suis sorti

De chez elle au petit matin.


Quatre vers dans le bain,

Sans cesse ressassés

Comme des gommes

Lancées en l'air.

Plutôt crever !

C'était exquis

Quand sur le lit

On s'est endormi.



Plutôt crever que de mourir

Cette après-midi.

Ram-dam

Télégramme, anagramme, programme,

Jéroboam, Abraham, ils se pâment,

Elles brament, toutes ces âmes,

Ça fait du ram-dam !


Manquerait plus qu'une femme

Et des kilogrammes…

Attendre, transitif

J'attends que quelque chose se passe.



Léger vent, silence de midi,

On boit du café,

On attend.



Des voix dans le jardin d'à côté,

La toile blanche, les souvenirs,

Le rêve du géant, un coq.



On attend encore :

Sortir du tombeau.



Il faut attendre le boiteux !

Kepler-186f

Kepler-186f, lui dis-je.

Ça ne marche pas !

Kepler-186f ! Kepler-186f !



Appuie sur le bouton !



Bon, reste en bas, je descends !

Ah, ça y est !

— — —

(Nous nous sommes croisés dans le vide intersidéral…)

Les œufs au four

J'ai faim, Faconde Norwest !

Va te faire cuire un œuf, Johnson Johnson !

Y a plus de gaz, j'te signale !



Et voilà une nouvelle recette.

Mars en scorpion

« Mars en scorpion,

Testicule en lampion ! »

Qu'il me fait en écrasant mes arpions,

Avant qu'on lui colle un bâillon

Sur sa face d'espion.

Le Visage

Kagi amène Faconde en haut de la montagne. Là, il dispose des portraits d'elle, à quelques dizaines de mètres de l'endroit où ils se trouvent. Puis il prend son arc, ferme les yeux, et lance une flèche, qui atteint sa cible. Il recommence. Tous les portraits sont maintenant piqués d'une flèche. 

Tu vois, c'est grâce à toi

(D'après Baudelaire)

Bandonéon

Bandonéon

Près de la clavicule,

Comme une pluie de bulles

Sous le menton.

Au Réveil

Le craquement

de l'osier

— Elle sait

qu'on est éveillé

Baleine

Qui a vu l'œil d'une baleine

S'ouvrir sur le côté

Connaît le bonheur

Et la beauté du monde.

Midi

Pommiers du Japon, forsythias,

Et puis la tombe,

Et le vent dans les hautes herbes,

Un peu de soleil inutile

Et le silence.

Maintenant !

Tout nous est donné en même temps. L’instant ne dépasse que très peu du jeu des hasards. Pourtant, il les foudroie. Comment ? Je sais en tout cas que le monde est là, dehors, dans le cadre. La lenteur des choses et notre mémoire me permettent encore de dessiner du doigt, de caresser avec ivresse la buée du visage de Sophie. Ma main sait qu’elle respire, la terre tremble doucement, les axes tournent sans bruit dans leur nuit tiède. Les continents se parlent, puis se taisent. Puis reprennent leur conversation calme, assourdie. Afrique, Europe, Asie, les fils frémissent, la rosée bourdonne. Tout est à sa place. Sous la mer, de grands corps se taisent, rient sous cape. Le visage est nu. Il appelle. J’ouvre ma main, j’écarte les doigts, je sens l’air cerner le mouvement, je la referme, mes ongles comme des falaises de glace. Je cherche dans les couleurs, je cherche dans le blanc. Vague jaune d’un corps assoupi. J’ouvre encore ma main, j’ai confiance en elle, elle sait encore, elle a toujours su. Le regard retourné, l’espace surplombé de son rire s’inscrivent dans les contours de chaleur qui dérivent en moi. Je sais que cette force de l’unique est offerte à la blessure, que de là vient l’arrogance de sa nudité. Elle s’avance et se retire du même mouvement, elle encercle mon sang. Ma main énorme, vêtement du temps flottant, barque des opéras simultanés, en toutes langues, dans toutes les contorsions ricanantes des foules anonymes. Sa question précise et muette, sa façon de remonter d’un temps oublié, de reprendre pied, de se remettre à respirer comme si elle avait perdu ce réflexe, ou comme si on avait oublié de lui laisser cet héritage, cette petite chose toute simple qui pourrait aller de soi. Rythme d’une peur tue, non négociée, giclée d’apnée sourde. Regard écho drap ventre souffle. Son visage comme un nuage. Poussières chaudes en spirales, dentelles de vertige, paupières à l’abandon sous le lichen du désir. Un fleuve de statues coule dans son corps, le gravier roule : milliers d’yeux, portes de givres rayées de vent.


Dans l’intervalle, son tympan de foutre, c’est ma signature-nacre, la droiture de ce geste d’hostie blanche courroucée. Soie froissée de son cul ouvert, angle, ongles, courbure nette de la voix rentrée, gravier dispersé, jeté sur la peau. Elle suce son pouce, puis elle dit : « Ta salope de queue, ta petite Pute de Bite… » en faisant claquer le "P" et le "B". Le con sonne : tulipe de son cul-regard. Toi-lèvres, Moi-livre : percussion de l’ouïe : pute, bite, pluite, puit, pulite, putiluth, tit’ flûte ! Signe, mon singe ! Saigne-moi sonore ! Vas-y, homme, sonne mon Nord, frappe-le de ta lime-lame ! Vise l’art de mon tour, visse mon trou, darde dans mon vase, garde ma vase dans tes couilles, pantin dur ! « Ma bête, ta bite ! » Empile, empale mon pôle. Je te pèle ton équateur, je mêle trop tes piques, je gobe tes globes, tu m’en mille doigts mal phallus anus, et moi molle, ton or dur j’en veux en corps, en sac, en vrac, en galop sucré, en lit-cœur-tache, en baisouille liche, touche mes loches, louche sur mon bout d’Uranus rose… Tu salipes l’hop ? Tu livres, tu vrilles, ta salive bruine, tes villes brunes burinent mes urnes ? Tu débarques ? Arrose ma bouche, mon lourd lézard chaud, grimpe sur ta tige et crie : « Terre ! » Trop tard, trop tôt, tire ton dard encore, je me fous du temps rouge qui pisse, je m’allonge, je mélange, je rallonge ton ange bandé, je remonte ton radar-fuseau, je lance ton museau hagard dans la grande raie du temps. De son index, elle agace le drap (aiguille torve). Elle attrape vite fait le traversin, se jette sur lui, et dit : « Je vais me branler, tu vas regarder, et tu vas gicler sur moi. » Elle est à quatre pattes, le visage sur le côté, elle remet ses lunettes pour me voir. Sa tulipe brune dépasse des plis et commence à coulisser sur le piston mou. Elle tort ses yeux pour me fixer, pendant que j’attrape ma queue, fort, à deux mains. Elle coule dans son lit, la petite statue salope, elle me dit : « Crache, crache ! accrache, décroche, vide ta cruche en croches, tu vas écouter ma vague de fugues, tu vas compter mes mille coups de con ! » Elle y va de son ricercare, de sa chaconne baveuse et furax, elle fruite ses soupirs, elle tord ses clefs, les fait fondre dans sa niche de lait brûlé, elle lèche sa paume, de son autre main soupèse mes couilles, et dit : « Maintenant ! »

Désordre à l'ourlet

Désordre à l’ourlet, disent-ils de ces femmes sans ombre ! Ce revers rond, cette mouillette tonale, tonique capiteuse, ce bel amas de foutaise renversée… Un jour viendra où les gouffres n’auront plus de bords ; en de longs plis sévères, les nez se coifferont de ce délit d’eau sale et langue torve.

Nuit gazeuse

Bruits de femmes ; fruits de blâme.

Nuit gazeuse de leurs jambes flottantes.

Après Mâcon

Après Mâcon, un fleuve,

et dans l’or bleuté du soir qui vient,

des enseignes vert-pomme et bleues

qui dépassent les lanières vert-ocre

des arbres en bande.

Civilité

Quand nous avons doublé

Le Cap Horn,

Celui-ci n'a pas klaxonné.


Tout le monde a droit

À une seconde chance !

Grog

Le Konzertmeister se lève,

Suivi par Norbert Stilnox.

Enfin, tout l'orchestre salue,

Avant qu'on remette le couvercle.


Il faut attendre quelques instants

Puis boire très chaud.

You Took Advantage of Me !

Dodo Normyl et Albert Duspasme

Sont complices ! Depuis le temps

Que je le dis… Personne

M'écoute jamais pourtant

Le spécialiste c'est moi

Avec Art Tatum qui tire

Sur sa pipe et Faconde à la pagaie

Qui souffle comme une

Daurade affamée du bosquet.

Président ! Hurle la vigie,

Il est l'heure d'honorer Madame.


Trop tard ! Cette conne est morte

À la suite de ses blés durs…

Accostons, Gérard, il sera toujours

Temps d'acheter un billet de retour.